L'industrie pétrochimique mondiale face à une profonde mutation: surcapacité et tarifs américains redessinent le paysage

Édité par : Татьяна Гуринович

Le secteur pétrochimique mondial traverse une période de turbulence sans précédent, caractérisée par une surcapacité chronique, des marges bénéficiaires négatives et des pertes significatives pour les grands producteurs. Cette crise, aggravée par les tarifs commerciaux américains et les coûts énergétiques élevés en Europe, entraîne une restructuration profonde, incluant des réductions de capacité, des fermetures d'usines et une réorientation stratégique dans des régions clés comme la Corée du Sud, l'Europe et la Chine.

En Corée du Sud, le gouvernement a initié une démarche d'assainissement du secteur. Dix des plus grandes entreprises pétrochimiques du pays se sont engagées à réduire leur capacité de vapocraquage d'éthylène de 2,7 à 3,7 millions de tonnes métriques par an, représentant environ 25 % de la capacité totale du pays. Cette mesure vise à rééquilibrer l'offre et la demande, LG Chem ayant déjà réduit sa production d'éthylène de 400 000 tonnes annuelles dans son complexe de Yeosu. L'objectif est de passer d'une production de masse à des produits chimiques de spécialité à plus forte valeur ajoutée, une stratégie jugée nécessaire pour retrouver la rentabilité, les taux d'utilisation des installations étant tombés en dessous de 70 %.

L'Europe, quant à elle, lutte contre des coûts énergétiques structurellement élevés depuis la crise de 2022. Cette situation rend l'industrie pétrochimique européenne moins compétitive par rapport aux États-Unis, où l'énergie est plus abordable. Des entreprises majeures comme Dow Inc. ont annoncé la fermeture définitive de trois sites de production en Allemagne et au Royaume-Uni d'ici fin 2027, affectant environ 800 emplois. Ces fermetures, qui incluent un vapocraqueur à Bohlen et des unités de chlore-alcali et de vinyle à Schkopau en Allemagne, ainsi qu'une usine de siloxanes de base à Barry au Royaume-Uni, sont une réponse directe à ces pressions économiques et à une demande régionale affaiblie. L'industrie européenne dans son ensemble est confrontée à des défis majeurs, avec des associations industrielles alertant sur une possible « extinction » du secteur si des mesures drastiques ne sont pas prises, comme la suppression des taxes sur le carbone et la garantie de prix d'énergie compétitifs.

La Chine, acteur majeur du marché pétrochimique mondial, envisage également une refonte de son industrie. Le gouvernement chinois cherche à éliminer les usines vieillissantes et moins efficaces, abaissant l'âge limite des installations considérées comme obsolètes de 30 à 20 ans. Cette politique vise à moderniser le paysage industriel, à améliorer la performance environnementale et l'efficacité énergétique, et à réduire l'excès de capacité dans les produits pétrochimiques de base. Cette restructuration, qui pourrait affecter plus de 40 % de la capacité de production de propylène et environ 12 % de la capacité d'éthylène, pourrait remodeler les dynamiques concurrentielles mondiales en allégeant la pression sur les marges des producteurs internationaux.

Les tarifs douaniers américains, initialement de 25 % sur les importations sud-coréennes avant d'être réduits à 15 % suite à un accord commercial, ont agi comme un catalyseur pour cette restructuration nécessaire. Bien que douloureuses à court terme, ces mesures externes poussent l'industrie à une discipline d'approvisionnement accrue, favorisant les acteurs les plus résilients et innovants. Les entreprises qui parviendront à s'adapter à ce nouvel environnement, en se concentrant sur la valeur ajoutée, l'efficacité opérationnelle et la durabilité, seront les mieux placées pour prospérer dans ce paysage pétrochimique en pleine évolution.

Sources

  • Reuters

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