« C'est une toute nouvelle façon d'envisager un processus de séparation », déclare Zachary P. Smith, professeur associé de génie chimique au MIT. Il souligne le potentiel de séparation des composants en fonction de leur forme et de leur taille plutôt que de les faire bouillir.
Dans un développement révolutionnaire, des ingénieurs du MIT aux États-Unis ont créé une membrane capable de filtrer les composants du pétrole brut en fonction de leur taille moléculaire. Cette innovation, révélée dans Science, promet une réduction significative du processus énergivore de fractionnement du pétrole brut, qui représente actuellement environ 6 % des émissions mondiales de CO2.
La nouvelle membrane sépare efficacement les composants lourds et légers du pétrole et résiste au gonflement, un problème courant avec les autres membranes de séparation du pétrole. Fabriquée sous forme de film mince, elle peut être fabriquée à l'aide des techniques industrielles existantes, ouvrant la voie à une adoption généralisée.
Le fractionnement conventionnel du pétrole par la chaleur consomme environ 1 % de l'énergie mondiale. L'utilisation de membranes pourrait réduire la consommation d'énergie d'environ 90 %. L'équipe du MIT a modifié les polymères utilisés dans le dessalement de l'eau par osmose inverse pour y parvenir, en les adaptant à la séparation des hydrocarbures.
La membrane modifiée utilise une liaison imine, plus rigide et hydrophobe que la liaison amide dans les membranes de dessalement de l'eau. Cela permet aux hydrocarbures de passer rapidement sans provoquer de gonflement. L'introduction de triptycène affine davantage la taille des pores pour le passage des hydrocarbures.
Andrew Livingston, professeur de génie chimique à l'Université Queen Mary de Londres, qualifie cela de « étape importante vers la réduction de la consommation d'énergie industrielle ». Il souligne son application innovante de la polymérisation interfaciale aux matières premières d'hydrocarbures.
Lors des tests, la membrane a permis d'obtenir une augmentation de 20 fois de la concentration en toluène par rapport au mélange d'origine. Elle a également séparé efficacement le naphta, le kérosène et le diesel en fonction de leur taille moléculaire. Les chercheurs envisagent une cascade de ces filtres pour purifier des mélanges complexes et isoler les produits chimiques souhaités.
Taehoon Lee, ancien postdoctorant au MIT, note que la polymérisation interfaciale est déjà utilisée pour les membranes de dessalement de l'eau. Cela rend possible l'adaptation des chaînes de fabrication existantes pour la production de masse, ce qui pourrait révolutionner le traitement du pétrole brut.